Page:Marx - Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure.djvu/123

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

même chez Aristote. Épicure a exprimé cette image, et c’est son mérite, la conséquence implacable de ses conceptions et développements. Les météores bravent l’entendement sensible, mais il surmonte leur défi et ne veut plus entendre parler que de son triomphe sur eux : οὐ γὰρ κατ’ ἀξιώματα κενὰ καὶ νομοθεσίας φυσιολογητέον, ἀλλ’ ὡς τὰ φαινόμενα ἐκκαλεῖται… (ὁ βίος) τοῦ ἀθορύβως ἡμᾶς ζῆν.[1] [Diog. X 86-87]. Il n’y a plus besoin de principes ni de présuppositions, là où la présupposition elle-même s’oppose à la conscience et l’effraie. Dans la frayeur, la représentation disparaît.

C’est pourquoi Épicure répète, comme s’il s’y reconnaissait lui-même, la phrase : πάντα μὲν οὖν γίνεται ἀσείστως κατὰ πάντων κατὰ πλεοναχὸν τρόπον ἐκκαθαιρομένων, συμφώνως τοῖς φαινομένοις, ὅταν τις τὸ πιθανολογούμενον ὑπὲρ αὐτῶν δεόντως καταλίπῃ, ὅταν δέ τις τὸ μὲν ἀπολίπῃ, τὸ δὲ ἐκβάλῃ, ὁμοίως σύμφωνον ὂν τῷ φαινομένῳ, δῆλον ὅτι καὶ ἐκ παντὸς ἐκπίπτει φυσιολογήματος ἐπὶ δὲ τὸν μῦθον καταρρεῖ[2] [Diog. Χ 87] La question se pose alors de savoir comment aménager l’explication : σηµεῖα δέ τινα τῶν ἐν τοῖς µετεώροις συντελουµένων φέρειν δεῖ παρ’ ἡµῖν τινα φαινοµένων, ἃ θεωρεῖται ἢ ὑπάρχει, καὶ οὐ τὰ ἐν τοῖς µετεώροις φαινόµενα ταῦτα γὰρ ἐνδεχέται πλεοναχῶς γενέσθαι. τὸ μέντοι φάντασμα ἑκάστου τηρητέον καὶ ἐπὶ τὰ συναπτόμενα τούτῳ διαιρετέον, ἃ οὐκ ἀντιμαρτυρεῖται τοῖς παρ’ ἡμῖν γινομένοις πλεοναχῶς συντελεῖσθαι[3]. [Diog. Χ 87]

  1. . Car pour ce qui est de la science de la nature dans sa spécificité, on ne doit pas s’en tenir à des règles et à des notions communes vides ; on doit au contraire s’accommoder des exigences des phénomènes eux-mêmes… afin que nous puissions vivre hors du trouble.
  2. . Tout s’effectue sans secousse, même si tout doit être purifié par l’explication de multiples manières, en accord avec les phénomènes ; on le voit quand on admet, comme il convient, ce qui est dit de convaincant à leur sujet ; mais si on admet une explication, mais qu’on en rejette une autre, alors que les deux s’accordent également avec les phénomènes, il est évident qu’on quitte le sol entier de la science de la nature pour tomber dans le pays du mythe.
  3. . Certains des phénomènes, observables d’après leur marche réelle, qui se produisent parmi nous contiennent des signes qui expliquent les phénomènes qui s’accomplissent dans les météores ; en effet, comme ceux des météores, ils peuvent se produire de multiples manières ; mais il faut bien observer le mode d’apparition de chacun et distinguer des phénomènes connexes ceux dont les phénomènes qui se déroulent chez nous ne contredisent pas qu’ils se déroulent de multiples manières.