Page:Marx - Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure.djvu/243

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

sés vers le bas par la pesanteur, donc poussés selon des lignes parallèles pour des raisons physiques, mais ils recevraient par l’intermédiaire d’une répugnance réciproque une autre direction, d’après Cicéron (de natura deorum I 25) un mouvement oblique, du fait de causes fortuites, et cela de toute éternité[1]. » D’abord, Cicéron, dans le passage cité, ne fait pas de la répulsion la raison de la direction oblique, mais au contraire de la direction oblique la raison de la répulsion. Ensuite, il ne parle pas de causes fortuites mais désapprouve, au contraire, qu’on n’indique pas de causes du tout ; ce serait d’ailleurs une contradiction en et pour soi d’admettre à la fois la répulsion et néanmoins des causes fortuites comme raison de la direction oblique. Tout au plus pourrait-il alors être question de causes fortuites de la répulsion, mais non de la direction oblique.

Une bizarrerie dans les réflexions de Cicéron et de Bayle saute par trop aux yeux pour ne pas être mise aussitôt en évidence. Ils prêtent en effet à Epicure des motifs dont l’un supprime l’autre. Tantôt Epicure doit admettre la déclinaison des atomes pour expliquer la répulsion, tantôt il doit l’admettre pour expliquer la liberté. Mais si les atomes ne se rencontrent pas sans la déclinaison, la déclinaison est superflue comme fondement de la liberté : car le contraire de la liberté ne commence, comme nous l’apprenons de Lucrèce[2], qu’avec la rencontre déterministe et forcée des atomes. Si, d’autre part, les atomes se rencontrent sans la déclinaison, c’est comme fondement de la répulsion que la déclinaison est superflue. Je prétends que cette contradiction naît lorsque les raisons de la déclinaison de l’atome de la ligne droite sont comprises de manière aussi extérieure et incohérente que chez Cicéron et Bayle. Nous trouverons chez Lucrèce, qui est somme toute le seul parmi tous les anciens à avoir compris la physique d’Epicure, un exposé plus profond.

Nous allons maintenant considérer la déclinaison en elle-même.

  1. . Schaubach, p. 549.
  2. . Lucrèce II, 251 sq.