Page:Marx - Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure.djvu/250

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effectivement réel, il faut qu’il ait brisé en lui son être-là relatif, la puissance de ses appétits et de la simple nature. La répulsion est la première forme de la conscience de soi ; elle répond donc à la conscience de soi, laquelle se conçoit comme quelque chose d’immédiatement-étant et d’abstraitement-singulier.

La répulsion est donc la réalisation effective du concept de l’atome, selon lequel il est la forme abstraite, mais tout autant du contraire de ce concept, selon lequel il est matière abstraite ; car ce à quoi l’atome se rapporte, ce sont bien des atomes, mais d’autres atomes. Mais si je me rapporte à moi-même comme à un immédiatement-Autre, mon rapport est un rapport matériel. C’est le plus haut degré d’extériorité qui puisse être pensé. Dans la répulsion des atomes, ce sont donc leur matérialité, qui avait été posée dans la chute en ligne droite, et leur détermination formelle, qui avait été posée dans la déclinaison, qui sont synthétiquement unies.

Démocrite, contrairement à Epicure, transforme en mouvement forcé, en acte de l’aveugle nécessité, ce qui pour Epicure est réalisation effective du concept de l’atome. Nous » avons déjà vu plus haut qu’il donne comme substance de la nécessité le tourbillon (δίνη), qui naît de la répulsion et du choc mutuel des atomes. Il n’envisage donc dans la répulsion que le côté matériel, la dispersion, la modification, et non le côté idéel, d’après lequel dans la répulsion toute relation à un Autre est niée et le mouvement est posé comme autodétermination. On le voit clairement dans le fait qu’il se figure d’une manière tout à fait matérielle un seul et même corps divisé en une multitude de corps par l’espace vide comme l’or qu’on a brisé en morceaux[1]. C’est donc à peine s’il conçoit que l’unité est le concept de l’atome.

Aristote a raison dans la polémique qu’il mène contre lui. « C’est pour cela que Leucippe et Démocrite, qui prétendent que les corps primordiaux se meuvent

  1. . Arist. ibid. 275 b.