Page:Marx - L’Allemagne en 1848.djvu/107

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les uns intentionnellement, les autres sans le savoir, dans l’intérêt direct de la Russie ; ils trahissaient la cause révolutionnaire pour l’ombre d’une nationalité qui, dans le meilleur des cas possibles, aurait partagé, sous le sceptre de la Russie, le sort de la Pologne. Il faut dire, cependant, pour l’honneur des Polonais, qu’ils ne se sont jamais laissés prendre sérieusement au piège panslaviste, et si quelques aristocrates sont devenus furieusement panslavistes, c’est parce qu’ils savaient qu’ils ont moins à perdre d’une soumission à la Russie que d’une révolte de leurs propres serfs paysans.

Les Tchèques et les Croates convoquèrent à Prague un Congrès général des Slaves, dans le but de préparer l’alliance universelle des Slaves. Ce Congrès aurait infailliblement échoué, même sans l’intervention de l’armée autrichienne. Les langues slaves différent entre elles autant que l’anglais, l’allemand et le suédois, et, à l’ouverture des séances, il ne se trouva aucune langue slave qui permît aux orateurs de se faire comprendre. On essaya le français, mais le français était également incompréhensible pour la majorité, — et les pauvres enthousiastes slaves, dont le seul sentiment commun était la haine commune contre les Allemands, furent obligés enfin de s’exprimer en cette langue allemande tant détestée : c’était la seule qui fût comprise par tout le monde ! Mais, au même moment, un autre Congrès slave se réunis-