Page:Marx - L’Allemagne en 1848.djvu/230

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reconnaîtra dans le coup d’État un acte de salut. que nous imposait la nécessité des circonstances. Elle sanctionnera le coup d’État après coup. Elle dira que nous avons violé une forme légale pour sauver la patrie. Que le sort en retombe « sur nous ». Si le ministère avait agi ainsi, il pourrait nous traduire devant votre tribunal avec quelque apparence de raison. La couronne aurait sauvé les apparences de la légalité. Il ne le pouvait, il ne le voulait pas.

Aux yeux de la couronne, la révolution de mars était un fait brutal. Un fait brutal ne peut être effacé que par un autre fait brutal. Le ministère, en cassant les nouvelles élections au nom de la loi d’avril 1848, reniait sa propre responsabilité, cassait la loi même vis-à-vis de laquelle il était responsable. Il en appelait de l’Assemblée nationale au peuple ; mais, de prime abord, il faisait de cet appel une illusion, une fiction, une duperie. Le ministère, en inventant une première Chambre basée sur le cens, en en faisant une partie intégrante de l’Assemblée législative, le ministère déchirait les lois organiques, abandonnait le terrain du droit, faussait les élections populaires, enlevait au peuple toute appréciation sur l’« acte de salut » de la couronne.

Ainsi donc, Messieurs, on ne peut le nier, et nul historien futur ne le niera jamais : la couronne a fait une révolution ; elle a abandonné avec mépris le terrain du droit ; elle ne peut en appeler aux