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de juin 1848 au 13 juin 1849
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Il annulait ainsi ses titres républicains. Il lui fallait alors faire reconnaître ses titres impérialistes. C’était tirer l’orléanisme de son sommeil : titres impérialistes et orléanistes pâlissaient à leur tour devant la légitimité. La chute de la République légale ne pouvait élever au pouvoir que son pôle opposé : la monarchie légitimiste. À ce moment, en effet, le parti orléaniste n’était que le vaincu de Février, et Bonaparte le vainqueur du 10 décembre. Ni l’un ni l’autre ne pouvaient opposer à l’usurpation républicaine leurs titres monarchiques également usurpés. Les légitimistes comprenaient combien l’instant était favorable. Ils conspiraient ouvertement. Ils pouvaient espérer trouver leur Monk dans le général Changarnier. On annonçait aussi bien dans leurs clubs l’avènement de la monarchie blanche que celui de la république rouge dans les clubs des prolétaires.

Une émeute, heureusement réprimée, aurait délivré le ministère de toutes les difficultés. « La légalité nous tue, » s’écriait Odilon Barrot. Une émeute aurait permis, sous prétexte de « salut public » de dissoudre la Constituante et de violer la constitution dans l’intérêt même de la constitution. La conduite brutale d’Odilon Barrot à l’Assemblée nationale, la proposition d’interdiction des clubs, la révocation bruyante de cinquante préfets tricolores, leur remplacement par des royalistes, le licenciement de la garde mobile, la brutalité de Changarnier envers les chefs de celle-