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les mémoires de nuxette
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sens grossiers de l’homme, émoussés par la bonne chère, mais qui secoue notre épiderme d’un léger frémissement, nous savons que l’automne approche. Automates, disent-ils !

Ce frisson quasi imperceptible, cette sorte de titillation des glandes capillaires provoquent chez les animaux à fourrure une lente pilation, et plus l’hiver sera rigoureux et plus longue et plus drue se fait notre pelisse. Trouvez-moi donc une invention humaine, baromètre, thermomètre, almanach, etc. qui puisse rivaliser avec nous pour pronostiquer ce que seront les saisons prochaines.

Aussi, en gens prévoyants, nous nous préparons selon les éventualités. Nous faisons au logis les réparations voulues et commençons à entasser nos provisions d’hivernement. Il arrive souvent que l’être spoliateur qu’est l’homme choisisse cette époque pour dévaster nos demeures et faire main basse sur le contenu. Puisqu’on est roi de la création, on aurait bien tort de se gêner. Et si Sa Majesté trouve nos magasins bien garnis, elle a tout juste assez de jugeotte pour conclure que nous nous préparons pour un long chômage. Vite, notre homme court copier servilement ce renseignement dans son almanach. Quel eurêka frauduleux ! Si ce n’est pas là du plagiat, je ne m’y connais pas.

Le papillon, lui, constate, avec non moins de perspicacité, que le pollen se durcit dans l’anthère ou que l’ovule se forme dans le pistil : donc la déhiscence a pris fin et l’été a vu ses beaux jours. Les arboricoles, eux, voient pâlir les feuilles le long de leurs nervures, les stomates s’atrophient, la pétiole se débilite, la sève se tarit, l’arbre, pris d’anémie, s’engourdit, l’alopécie se déclare, il perd sa toison, et enfin, la léthargie hibernale commence.

Croit-il, l’homme, que l’oiseau attende que la neige tombe pour songer à la migration. Non, dès que l’automne s’annonce, il sent, au bout de ses rémiges, un léger frisson qui l’avertit que l’heure du déménagement est arrivée.