Quant à Nazaire, un rude travailleur qui trimait dur toute la semaine, il était convenu, depuis longtemps, qu’il était le maître de ses allées et venues. Le père, avec sa philosophie de laisser-faire, avait haussé les épaules et murmuré : faut bien que jeunesse se passe !
C’était ainsi tout le long des « rangs » jusqu’au Petit Lac où l’on arrivait vers les huit heures, en chantant en chœur : « Tu n’es pas maître dans ta maison quand nous y sommes ! » ou bien « Laissez passer les raftmen. »
Ces fredons donnent une idée du programme habituel de ces soirées dites communément « bals à l’huile » et reflètent assez fidèlement l’état d’esprit des… noceurs.
Va sans dire qu’à cette époque, le bridge n’avait pas encore envahi nos cantons et le passe-temps favori était la danse. Les promoteurs, recrutés dans chacune des paroisses circonvoisines, avaient fait construire, sur le bord du lac, une longue plate-forme entourée de garde-fous (soit dit sans malice). Aux coins de cette plate-forme, on avait planté quatre poteaux auxquels on suspendait autant de falots lorsque Phoebé se mettait en grève et refusait le luminaire.
Sur une estrade haute d’à peu près deux pieds trônait le violoneux, conscient de son importance, battant la semelle et dodelinant la tête, histoire de mieux scander le rythme douteux de ses polkas improvisées.
Et l’on dansait, et l’on dansait, comme sur le pont d’Avignon farandolaient les concitoyens du Sire Tistet Védêne au son du galoubet.
De temps à autre, durant la soirée, des couples quittaient l’enceinte de la danse et se dirigeaient vers le bois, pour aller s’y rafraîchir, car vous vous doutez bien que l’institution chorégraphique de Sainte-Pudentienne possédait son indispensable buffet. Oh ! on n’était pas plus fier pour l’installation qu’on était regardant à la dépense, car si le buffet consistait tout bonne-