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massé… doine
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querelle d’Allemand. Toutefois, on était convenu d’avoir l’œil au guet et si l’intrus s’avisait de dépasser les bornes de la convenance (!) avec les demoiselles, les forces coalisées lui feraient vite son affaire.

Après avoir papillonné de tout côté, répondant d’un sourire ou d’un bon mot aux propos flatteurs des jeunes filles comme aux façons plutôt rogues des jeunes gens, notre inconnu sembla jeter son dévolu sur la jolie Antoinette. Il s’approcha d’elle et, après une révérence correcte et les banalités préliminaires, il l’enlaça d’une étreinte galante et la contagion de l’exemple fit que le tourbillon devint bientôt général.

Et l’on dansa, et l’on dansa, tout comme ces bons Provençaux au temps heureux des troubadours et ménestrels, ancêtres des félibres !

Sur le minuit, une certaine accalmie se produisit et tous se disposaient à se rendre au buffet pour se mettre quelque chose sous la dent lorsque, tout à coup, un bruit formidable ressemblant à un coup de foudre ou à la détonation d’une arme à feu se fit entendre. Au même instant, on vit fulgurer, dans les ténèbres, une lueur rougeâtre qui semblait sortir du rocher, de l’autre côté du lac, et qui disparut ou s’éteignit aussitôt. Un long cri fait de stupeur et de détresse retentit, puis tout retomba dans le silence.

On s’imagine mieux qu’on ne peut décrire le revirement qui s’opéra dans l’état d’âme des assistants. Tous semblèrent frappés d’un mutisme subit. Les regards effarés s’interrogeaient à la lumière pâlotte des falots laquelle exagérait la lividité de ces faces pétrifiées de peur. L’enjouement et l’insouciance avaient fait place à la frayeur et à la consternation. Bientôt pourtant, les nerfs se détendirent et cet excès d’émotions se donna libre cours dans les larmes des filles et le verbiage incohérent des gars. Affolées jusqu’à l’hystérie, celles-là se désolaient et sanglotaient à cœur fendre tandis que ceux-ci se po-