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MES SOUVENIRS
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latin. Je ne puis songer à Verdi, sans me rappeler cette parole fameuse de Nietzsche, revenu du wagnérisme et même retourné contre lui : « Il faut méditerraniser la musique. » Non pas certes la musique tout entière. Mais aujourd’hui qu’a disparu le vieux maître, l’hôte glorieux de ce palais Doria, d’où son regard profond s’étendait chaque hiver sur l’azur de la mer ligurienne, on peut se demander qui viendra sauver dans la musique les droits et l’influence de la Méditerranée. »

. . . . . . . . . . . . . . . . . .

Pour ajouter encore à mes souvenirs de Thaïs, je rappellerai ces deux lettres qui devaient me toucher si vivement :
« Ier août 1892.

« ... Je vous avais apporté à l’Institut la petite poupée Thaïs, et comme je partais pour la campagne au sortir de la séance où vous n’êtes pas venu, je l’ai laissée à Bonvalot, le priant de la traiter avec soin. J’espère qu’il ne l’aura pas déshonorée, qu’il vous la rendra vierge encore.

« Je rentre ces jours-ci, d’autant que samedi nous recevons Frémiet, qui me charge de vous remercier de lui avoir donné votre voix.

« Gérome. »

Cette statuette polvchrome, œuvre de mon illustre confrère, avait été désirée par moi pour être placée sur ma table pendant que j’écrivais Thaïs. J’ai toujours