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quant au nombre des prisonniers restés aux mains de l’ennemi. Ainsi, s’il faut en croire le P. Chaumonot, quatorze sauvages seraient restés fidèles jusqu’au bout à Dollard et à ses compagnons, tandis que la Relation de 1659-1660 laisse entendre et M. Dollier de Casson dit expressément, que seuls les 17 Français, Anontaha et les 4 Algonquins ont mérité l’honneur du complet sacrifice. D’après le P. Chaumonot, quatre Français et 4 Hurons auraient été faits captifs par les Iroquois et ensuite brûlés. L’auteur de la Relation de son côté parle de 5 Français et de 4 Hurons prisonniers. Enfin M. Dollier de Casson nous apprend que les bourreaux iroquois durent se contenter d’une seule victime, tous les autres combattants ayant été heureusement sauvés par la mort de la torture et du bûcher. Et nous ne parlons pas des diverses péripéties de la lutte qui varient considérablement de l’un à l’autre annaliste.

Toutes ces divergences cependant, s’expliquent aisément. Le combat du Long-Sault s’est passé en plein pays sauvage et aucun rien est revenu de ceux qui auraient pu en fournir un rapport absolument fiable.

La première nouvelle en fut apporté à Ville-Marie le 3 juin par un Huron nommé Louis, qui avait réussi à s’échapper des mains des Iroquois. Ce Huron, qui était sans doute de ceux amenés de Québec par Anontaha, n’eut rien de plus pressé que de regagner sa mission après une aussi terrible aventure et c’est de lui que le P. Chaumonot tient le récit qui nous a été conservé par la Mère de l’Incarnation. Comment se fait-il que le Père Lalemant, l’auteur présumé de la Relation de 1659-1660, nous ait laissé du même événement un récit si différent alors qu’il écrivait dans le même temps que le Père Chaumonot, et pour ainsi, dire tout près de lui ? Cela, au premier abord, paraît assez singulier. L’un et l’autre, sous l’émotion de la première nouvelle, se sont empressés de consigner par écrit le récit du désastre, tel qu’ils le recevaient de bouches différentes, impuissants qu’ils étaient d’ailleurs à en contrôler l’exactitude. Il est évident que l’informateur du Père Lalemant est autre que celui du Père Chaumonot. Peut-être était-ce cette fois l’un des quatre sauvages qui accompagnèrent Mme d’Ailleboust de Ville-Marie à Québec en août 1660.

M. l’abbé Faillon, qui, en se basant sur les sources originales, a fait du combat du Long-Sault le récit le plus vivant et le plus complet qu’il sera probablement jamais possible d’attendre, parait avoir accepté les versions de M. Dollier de Casson et de M. de Belmont presque partout où elles ne concordaient pas avec celles des deux missionnaires jésuites. Nous ne croyons pas que le savant sulpicien ait été animé en cria par le moindre esprit de partialité envers des confrères. Patient chercheur et passé maître en cette science critique que ne connaissaient