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Page:Maufrais Aventures au Matto Grosso 1951.djvu/101

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du village qui me reçoit, accroupi sur une natte de fibre, les reins ceints d’un pagne de toile grossière.

Il est très digne d’ailleurs, avec un visage aux traits nettement asiatiques comme tous les Indiens d’Amérique du Sud, robuste malgré l’âge qu’il prétend, à peine tatoué de deux cercles bleuâtres sur les pommettes saillantes. Sa peau est bronzée, satinée, luisante d’huile végétale, et ses cheveux descendent très longs dans le cou. Son parler est rauque, presque incompréhensible. Il bredouille un portugais bizarre et notre conversation ne manquerait pas d’amuser un Brésilien. Il accepte la cigarette que je lui donne et me concède de bonne grâce un coin de sa natte.

Nous nous observons.

Deux femmes silencieuses nous tournent le dos, emmitouflées dans une couverture rouge qui laisse deviner des formes gracieuses. Elles travaillent à la confection d’un breuvage grisâtre et malodorant dont elles emplissent au fur et à mesure de minuscules calebasses. Une gamine toute nue, aux grands yeux éveillés, me regarde intensément. Des bracelets de chanvre teints en rouge ornent ses chevilles et son petit corps est entièrement tatoué de dessins étranges.

— Tout va bien sous ton toit, chef ?

— Tout va.

— Qu’as-tu de bon à vendre au Tori (blanc) ?

— Des flèches, des peaux.

— Montre…

Les flèches sont banales, j’en possède déjà une collection complète et ne me préoccupe guère d’en acquérir d’autres. Les arcs sont mal travaillés ; la corde est de