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Page:Maufrais Aventures au Matto Grosso 1951.djvu/151

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vivent du froissement de milliers d’ailes qui les griffent à la recherche de leur proie.

Le feu attisé flambe : tout est humide alentour, glacé. Le café brûlant vient à point nous ravigoter.

Si mes souvenirs sont exacts, nous sommes aujourd’hui le douze octobre. Le soleil brille enfin dans un ciel limpide, il fait bon maintenant, tout à l’heure on crèvera de chaleur. Les chevaux sont amenés et rapidement harnachés. Le mien est fauve, je l’appelle aussitôt « Clairon », monte en selle et m’aperçois qu’il est assez rétif et surtout très nerveux. Je le caresse de mon mieux et tâche de m’en faire un ami. Mais comprend-il le français ?

Mon voisin immédiat est Duke, un noir sympathique et méticuleux qui prend un soin extrême du banjo pend à sa selle et passe son temps à écraser à coups de cravache les énormes guêpes qui viennent, avec une prédilection toute particulière, trottiner sur mes omoplates. Gaudino conduit la marche, après Gaudino vient Meirelles perdu dans ses pensées, puis Pablo qui fredonne des sambas. Manoel est en queue et mal réveillé, peste contre les deux mulets qu’il a pour mission de surveiller et qui sont chargés de tout le matériel.

Nous allons au petit trot. Aussi loin que la vue s’étende c’est le « serrado », cette pampa typiquement brésilienne parsemée de maigres bouquets d’arbres qui se ressemblent tous, avec des buissons épineux qui marquent les pattes de nos chevaux de zébrures sanglantes. L’herbe est rare, coupante comme un rasoir, avec des éclats métalliques.

Pas d’oiseaux, pas de fleurs, seulement de temps à autre