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Page:Maufrais Aventures au Matto Grosso 1951.djvu/85

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frère, et me dit entre deux hoquets, avec une révérence comique :

— Sa Grâce ne doit craindre aucun accident cette nuit. Excellence, vous êtes mon ami et je me déclare responsable de vos actes ; vous pourrez danser avec nos filles sans qn’aucun de ces bandits ne vienne vous importuner… Puis il ajoute en clignant de l’œil avec un sourire coquin et un vocabulaire beaucoup moins emphatique :

— Tout de même… si vous éprouvez certains besoins … confiez-vous à moi… pour pas cher je vous conduirai où il faut, sao méninas de quinze anos bem bonitinhas…

J’acquiesce vaguement de la tête, un peu abruti par l’alcool que je viens de boire et la fumée âcre qui stagne. Il fait une chaleur épouvantable et comme beaucoup d’hommes l’ont déjà fait, je retire ma chemise pour être plus à l’aise. Le patron est retourné à ses occupations, mais auparavant et pour bien marquer son rôle d’hôte empressé, il m’a présenté Manoel.

Garçon pratique, sans occupation bien définie, après quelques tournées qui ébréchèrent fortement mes maigres économies, moyennant cent cruseiros et une corde de tabac, Manoel, cédant enfin à mes instances, promet de vaincre son apathie et de m’aider à réaliser le projet que je lui confiais et que je caressais en secret depuis mon arrivée à Leopoldina : en deux mots, visiter les placers de diamants du Rio das Garcas, à quelque sept cents kilomètres d’ici.

L’affaire fut conclue séance tenante et je m’en félicitai lorsque je surpris le regard de Manoel fixé avec insistance dans un coin de la pièce. Je regardai à mon tour.