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Page:Maufrais Aventures au Matto Grosso 1951.djvu/90

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soin, la jalouser, établir autour d’elle pour mieux sauvegarder son droit de propriété, une réputation terrible, tuer celui qui ose la regarder, lui parler ou la frôler. Comme il faut veiller sur celle qui est pour vous l’oubli des heures dures et, comme le prospecteur qui jalonne son terrain d"exploitation, veiller à ce que nul ne franchisse les bornes et piétine ses plates-bandes.

Pourtant, lorsqu’on sort de l’enfer de la forêt, de celui de la rivière, après des nuits et des nuits de solitude, comme il est tentant de frôler, d’une main avide et experte, les seins canailles tendus sous les corsages étroits de fillettes qui sont déjà des femmes, quoique graciles encore, rouées, lascives, balançant à plaisir leurs hanches rondes et fermes, se sachant désirées, se faisant encore désirer davantage comme si elles aimaient le sang qui présage le rut, prêtes à se donner au mâle qui tue pour les posséder, et dont elles seraient l’esclave aveugle.

Comme un jouet aussi qui passera de mains en mains, héritage terrible qui engendre la mort. Mais que vaut la vie d’un homme, le sang des autres, son propre sang ?

C’est avec lui que se paye une nuit d’étreintes.

Femmes, elles le sont à huit ans, à dix, à douze, jamais plus tard ; vendues par leurs familles, prises ou données.

Les hommes disent qu’ils les épousent jeunes, mais attendent leur nubilité pour les faire femme. Mais très vite les ventres enflent pour éclater avec la délivrance de la maternité et c’est le seul moyen de s’assurer la propriété d’une gamine qui sera bientôt fille recherchée, enjeu de maintes disputes.

Et nul prêtre n’est là pour sanctifier les unions hâtives