Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/136

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Vendredi 18 Novembre.

La plage où j’avais amarré le canot est inondée entièrement ; seule la partie supérieure de l’îlot où j’avais installé le camp émerge. Mon domaine est subitement devenu une plate-forme cernée par le courant tumultueux des eaux en crue, car les eaux ont monté formidablement. Le canot est à demi coulé. Tout est trempé, pour ne pas changer, y compris moi-même, car un tendeur de la bâche ayant cédé, celle-ci n’a pas résisté au déluge et le hamac faisait autant d’eau que la pirogue.

La journée s’annonce pénible, mes mains sont enflées, je ne les reconnais pas… de vraies mains d’étrangleur, boudinées et couturées de plaies bourrelées de pus.

Si j’étais pianiste, je serais désolé, mais, en tant que randonneur, je me moque de l’esthétique. Seulement, ça gène, mais, lorsqu’elles sont échauffées, je ne sens plus rien.

Et hop, matelot ! tire sur l’aviron — À l’avant, Boby grelotte et me jette des regards angoissés, semblant me dire :

— Et bien quoi patron, on va loin comme ça ? Pauvre cabot… Ce n’est que le second jour de ta peine !

Décidément, le courant est fort et je n’ai pas l’habileté requise car je suis sans cesse déporté à son gré. Il est vrai que Je canot est trop grand pour moi seul et alourdi sans cesse de l’eau y pénétrant de tous les bords. Je tire sur la pagaie, avançant mètre par mètre, parfois faisant du sur place ou même reculant. Sacré canot… Lorsque je pense qu’avec 5.000 francs je pouvais avoir une merveille de pirogue bosch, juste fai-