Je me tournai vers le lieutenant.
— Quel est ce lac ? lui demandai-je.
Il se mit à rire et répondit :
— Ce n’est pas de l’eau, c’est du sel. Tout le monde s’y tromperait, en effet, tant l’illusion est parfaite. Cette Sebkra, qu’on appelle ici Zar’ez (le Zar’ez-Chergui), a environ cinquante à soixante kilomètres de longueur sur vingt, trente ou quarante kilomètres de largeur, suivant les endroits. Ces chiffres sont, bien entendu, approximatifs, ce pays n’ayant été que rarement et rapidement traversé, comme il l’est par nous aujourd’hui. Ces lacs de sel (ils sont deux, l’autre se trouve plus à l’ouest) donnent d’ailleurs leur nom à toute cette contrée, qu’on appelle le Zar’ez. A partir de Bou-Saada, la plaine s’appelle le Hodna, baptisée alors par le lac salé de Msila.
Je regardais avec une stupéfaction émerveillée l’immense nappe de sel étincelant sous le soleil enragé de ces contrées. Toute cette surface, plane et cristallisée, luisait comme un miroir démesuré, comme une plaque d’acier ; et les yeux brûlés ne pouvaient supporter l’éclat de ce lac étrange, bien qu’il fût encore à vingt kilomètres de nous, ce que j’avais peine à croire, tant il me paraissait proche.