Page:Maupassant - Bel-Ami, OC, Conard, 1910.djvu/103

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Il allait toujours, appelant Duroy « mon cher ami ».

— Et il a des mots à la Balzac, ce grigou. Figurez-vous que, l’autre jour, je me trouvais dans son cabinet avec cette antique bedole de Norbert, et ce Don Quichotte de Rival, quand Montelin, notre administrateur, arrive, avec sa serviette en maroquin sous le bras, cette serviette que tout Paris connaît. Walter leva le nez et demanda : « Quoi de neuf ? »

Montelin répondit avec naïveté : « Je viens de payer les seize mille francs que nous devions au marchand de papier. »

Le patron fit un bond, un bond étonnant.

— Vous dites ?

— Que je viens de payer M. Privas.

— Mais vous êtes fou !

— Pourquoi ?

— Pourquoi… pourquoi… pourquoi…

Il ôta ses lunettes, les essuya. Puis il sourit, d’un drôle de sourire qui court autour de ses grosses joues chaque fois qu’il va dire quelque chose de malin ou de fort, et avec un ton gouailleur et convaincu, il prononça : « Pourquoi ? Parce que nous pouvions obtenir là-dessus une réduction de quatre à cinq mille francs. »

Montelin, étonné, reprit : « Mais, monsieur le directeur, tous les comptes étaient régu-