Page:Maupassant - Bel-Ami, OC, Conard, 1910.djvu/448

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fait entrer de force dans cette maison ? Et voilà maintenant comment tu me parles ! comment tu me reçois ! Mon Dieu ! Mon Dieu ! que tu me fais mal !

Il frappa du pied, et, violemment :

— Ah ! mais, zut ! En voilà assez. Je ne peux pas te voir une minute sans entendre cette chanson-là. On dirait vraiment que je t’ai prise à douze ans et que tu étais ignorante comme un ange. Non, ma chère, rétablissons les faits, il n’y a pas eu détournement de mineure. Tu t’es donnée à moi, en plein âge de raison. Je t’en remercie, je t’en suis infiniment reconnaissant, mais je ne suis pas tenu d’être attaché à ta jupe jusqu’à la mort. Tu as un mari et j’ai une femme. Nous ne sommes libres ni l’un ni l’autre. Nous nous sommes offert un caprice, ni vu ni connu, c’est fini.

Elle dit :

— Oh ! que tu es brutal ! que tu es grossier, que tu es infâme ! Non ! je n’étais plus une jeune fille, mais je n’avais jamais aimé, jamais failli…

Il lui coupa la parole :

— Tu me l’as déjà répété vingt fois, je le sais. Mais tu avais eu deux enfants… je ne t’ai donc pas déflorée…

Elle recula :