Page:Maupassant - Bel-Ami, OC, Conard, 1910.djvu/536

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— Ne me touchez pas. Je suis inviolable !

Du Roy s’élança vers lui, comme pour le terrasser, et il lui grogna dans la figure :

— Il y a flagrant délit… flagrant délit. Je peux vous faire arrêter, si je veux… oui, je le peux.

Puis, d’un ton vibrant :

— Cet homme s’appelle Laroche-Mathieu, ministre des affaires étrangères.

Le commissaire de police recula stupéfait, et balbutiant :

— En vérité, monsieur, voulez-vous me dire qui vous êtes, à la fin ?

L’homme se décida, et avec force :

— Pour une fois, ce misérable-là n’a point menti. Je me nomme, en effet, Laroche-Mathieu, ministre.

Puis tendant le bras vers la poitrine de Georges, où apparaissait comme une lueur, un petit point rouge, il ajouta :

— Et le gredin que voici porte sur son habit la croix d’honneur que je lui ai donnée.

Du Roy était devenu livide. D’un geste rapide, il arracha de sa boutonnière la courte flamme de ruban, et, la jetant dans la cheminée :

— Voilà ce que vaut une décoration qui vient de salops de votre espèce.

Ils étaient face à face, les dents près des