Page:Maupassant - Bel-Ami, OC, Conard, 1910.djvu/98

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L’employé lui coupa la parole :

— Ce n’est pas la peine de gueuler comme ça…

M. Perthuis, un gros homme rouge comme une crête de coq, demeura suffoqué par la surprise.

Duroy reprit :

— J’en ai assez de votre boutique. J’ai débuté ce matin dans le journalisme, où on me fait une très belle position. J’ai bien l’honneur de vous saluer.

Et il sortit. Il était vengé.

Il alla en effet serrer la main de ses anciens collègues, qui osaient à peine lui parler, par peur de se compromettre, car on avait entendu sa conversation avec le chef, la porte étant restée ouverte.

Et il se retrouva dans la rue avec son traitement dans sa poche. Il se paya un déjeuner succulent dans un bon restaurant à prix modérés qu’il connaissait ; puis, ayant encore acheté et laissé la Vie Française sur la table où il avait mangé, il pénétra dans plusieurs magasins où il acheta de menus objets, rien que pour les faire livrer chez lui et donner son nom : « Georges Duroy ».

Il ajoutait : « Je suis le rédacteur de la Vie Française. »

Puis il indiquait la rue et le numéro, en