Page:Maupassant - Boule de suif, 1902.djvu/193

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

L’AVEU


Le soleil de midi tombe en large pluie sur les champs. Ils s’étendent, onduleux, entre les bouquets d’arbres des fermes, et les récoltes diverses, les seigles mûrs et les blés jaunissants, les avoines d’un vert clair, les trèfles d’un vert sombre, étalent un grand manteau rayé, remuant et doux sur le ventre nu de la terre.

Là-bas, au sommet d’une ondulation, en rangée comme des soldats, une interminable ligne de vaches, les unes couchées, les autres debout, clignant leurs gros yeux sous l’ardente lumière, ruminent et pâturent un trèfle aussi vaste qu’un lac.

Et deux femmes, la mère et la fille, vont, d’une allure balancée l’une devant l’autre, par un étroit sentier creusé dans les récoltes, vers ce régiment de bêtes.

Elles portent chacune deux seaux de zinc maintenus loin du corps par un cerceau de barrique ; et le métal, à chaque pas qu’elles font, jette une flamme éblouissante et blanche sous le soleil qui le frappe.