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la reine hortense

« Viens ici, mon petit Philippe, embrasse ta mère. Tu l’aimes bien ta maman, dis, mon enfant ? Toi, Rose, tu vas veiller sur ta petite sœur pendant que je serai sortie. Surtout, ne la laisse pas seule, tu m’entends ? Et je te défends de toucher aux allumettes. »

Elle se taisait quelques secondes, puis, d’un ton plus haut, comme si elle eût appelé : « Henriette ! » Elle attendait un peu, et reprenait : « Dis à ton père de venir me parler avant d’aller à son bureau. » Et soudain : « Je suis un peu souffrante aujourd’hui, mon chéri ; promets-moi de ne pas revenir tard. Tu diras à ton chef que je suis malade. Tu comprends qu’il est dangereux de laisser les enfants seuls quand je suis au lit. Je vais te faire pour le dîner un plat de riz au sucre. Les petits aiment beaucoup cela. C’est Claire qui sera contente ! »

Elle se mettait à rire, d’un rire jeune et bruyant, comme elle n’avait jamais ri : « Regarde Jean, quelle drôle de tête il a. Il s’est barbouillé avec les confitures, le petit sale ! Regarde donc, mon chéri, comme il est drôle ! »

Colombel, qui changeait de place à tout moment