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mademoiselle cocotte

dinier. Et ils hurlaient des nuits entières autour du bâtiment où logeait leur amie, sans que rien les décidât à s’en aller.

Dans le jour, ils pénétraient jusque dans la maison. C’était une invasion, une plaie, un désastre. Les maîtres rencontraient à tout moment dans l’escalier et jusque dans les chambres des petits roquets jaunes à queue empanachée, des chiens de chasse, des bouledogues, des loups-loups rôdeurs à poil sale, vagabonds sans feu ni lieu, des terre-neuve énormes qui faisaient fuir les enfants.

On vit alors dans le pays des chiens inconnus à dix lieues à la ronde, venus on ne sait d’où, vivant on ne sait comment, et qui disparaissaient ensuite.

Cependant François adorait Cocotte. Il l’avait nommée Cocotte, sans malice, bien qu’elle méritât son nom ; et il répétait sans cesse : « Cette bête-là, c’est une personne. Il ne lui manque que la parole. »

Il lui avait fait confectionner un collier magnifique en cuir rouge qui portait ces mots gravés sur une plaque de cuivre : « Mademoiselle Cocotte, au cocher François. »