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Page:Maupassant - Conte de la bécasse, 1906.djvu/186

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un normand

confusion ni d’erreurs. Ils sont jaloux les uns des autres comme des cabotins.

Pour ne pas se tromper, les vieilles bonnes femmes viennent consulter Mathieu.

— Pour les maux d’oreilles, qué saint qu’est l’meilleur ?

Mais y a saint Osyme qu’est bon ; y a aussi saint Pamphile qu’est pas mauvais.

Ce n’est pas tout.

Comme Mathieu a du temps de reste, il boit ; mais il boit en artiste, en convaincu, si bien qu’il est gris régulièrement tous les soirs. Il est gris, mais il le sait ; il le sait si bien qu’il note, chaque jour le degré exact de son ivresse. C’est là sa principale occupation ; la chapelle ne vient qu’après.

Et il a inventé, — écoutez bien et cramponnez-vous, — il a inventé le saoulomètre.

L’instrument n’existe pas, mais les observations de Mathieu sont aussi précises que celles d’un mathématicien.

Vous l’entendez dire sans cesse : « D’puis lundi, j’ai passé quarante-cinq. »

Ou bien : « J’étais entre cinquante-deux et cinquante-huit. »