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Page:Maupassant - Conte de la bécasse, 1906.djvu/38

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ce cochon de morin

ayant disparu dans les allées tournantes ; et je lui fis une vraie déclaration, longue, douce, en lui pressant et lui baisant les doigts. Elle écoutait cela comme une chose agréable et nouvelle, sans bien savoir ce qu’elle en devait croire.

Je finissais par me sentir troublé, par penser ce que je disais ; j’étais pâle, oppressé, frissonnant ; et, doucement, je lui pris la taille.

Je lui parlais tout bas dans les petits cheveux frisés de l’oreille. Elle semblait morte, tant elle restait rêveuse.

Puis sa main rencontra la mienne et la serra ; je pressai lentement sa taille d’une étreinte tremblante et toujours grandissante ; elle ne remuait plus du tout ; j’effleurais sa joue de ma bouche ; et tout à coup mes lèvres, sans chercher, trouvèrent les siennes. Ce fut un long, long baiser ; et il aurait encore duré longtemps ; si je n’avais entendu « hum, hum » à quelques pas derrière moi.

Elle s’enfuit à travers un massif. Je me retournai et j’aperçus Rivet qui me rejoignait.

Il se campa au milieu du chemin, et, sans rire : « Eh bien ! c’est comme ça que tu arranges l’affaire de ce cochon de Morin ? »