Page:Maupassant - Contes de la bécasse, 1894.djvu/265

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neville ; mais lorsqu’il apprit qu’ils étaient à Rautôt, il ne sortit plus de sa maison, et il guettait sans cesse la route par la petite fenêtre de sa cuisine, s’attendant à tout moment à voir passer des baïonnettes.

Un matin, comme il mangeait la soupe avec ses serviteurs, la porte s’ouvrit, et le maire de la commune, maître Chicot, parut suivi d’un soldat coiffé d’un casque noir à pointe de cuivre. Saint-Antoine se dressa d’un bond ; et tout son monde le regardait, s’attendant à le voir écharper le Prussien ; mais il se contenta de serrer la main du maire qui lui dit : « — En v’la un pour toi, Saint-Antoine. Ils sont venus c’te nuit. Fais pas de bêtise surtout, vu qu’ils parlent de fusiller et de brûler tout si seulement il arrive la moindre chose. Te v’la prévenu. Donne-li à manger, il a l’air d’un bon gars. Bonsoir, je vas chez l’s’autres. Y en a pour tout le monde. » Et il sortit.