Page:Maupassant - Fini de rire, paru dans Gil Blas, 23 février 1882.djvu/4

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sentir de loin la crasse amoncelée des magasins de costumes. Ils sont assis bien sagement les uns en face des autres, les mains sur leurs genoux ; ils ne font pas de farces, ils ne rient pas.

— Pourquoi sont-ils là ? — Le savent-ils au juste ? — Au milieu d’eux, quatre valets d’écurie, habillés en piqueurs, sonnent du cor. Et les ahuris du trottoir regardent tristement les mornes fantoches de la voiture.

Voilà le plaisir !

Songeons aux fêtes anciennes du peuple rieur et naïf ; aux gaietés colossales des foules en délire, aux cris, aux contorsions, à la folie, passant en certains jours, comme un ouragan, sur les villes et les campagnes, et secouant les esprits, ainsi que des grelots, et faisant bondir les corps sans raison, crier les bouches, rendant la France entière pareille à un hôpital de fous.



Et on appelait en effet « fête des fous » la plus ancienne peut-être des réjouissances publiques, celle dont, sans doute, est sorti le « Carnaval ».

Elle remonte à peu près à l’an 633. C’était une étrange saturnale qui rappelait les orgies sacrées de l’Antiquité en ce sens