Page:Maupassant - Fort comme la mort.djvu/184

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ger aux choses tristes, afin de retrouver la santé de son teint.

Elle ne voulait pas surtout retourner à Paris et revoir Olivier Bertin avant d’être redevenue elle-même. Comprenant qu’elle avait trop maigri, que la chair des femmes de son âge a besoin d’être pleine pour se conserver fraîche, elle cherchait de l’appétit sur les routes et dans les bois voisins, et bien qu’elle rentrât fatiguée et sans faim, elle s’efforçait de manger beaucoup.

Le comte, qui voulait repartir, ne comprenait point son obstination. Enfin, devant sa résistance invincible, il déclara qu’il s’en allait seul, laissant la comtesse libre de revenir lorsqu’elle y serait disposée.

Elle reçut le lendemain la dépêche annonçant l’arrivée d’Olivier.

Une envie de fuir la saisit, tant elle avait peur de son premier regard. Elle aurait désiré attendre encore une semaine ou deux. En une semaine, en se soignant, on peut changer tout à fait de visage, puisque les femmes, même bien portantes et jeunes, sous la moindre influence sont méconnaissables du jour au lendemain. Mais l’idée d’apparaître en plein soleil, en plein champ, devant Olivier, dans cette lumière du mois d’août, à côté d’Annette si fraîche, l’inquiéta tellement, qu’elle se décida tout de suite à ne point aller à la gare et à l’attendre dans la demi-ombre du salon.