Page:Maupassant - Fort comme la mort.djvu/205

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avec un regard distrait, qu’elle retournait à ses fleurettes. Il s’exaspérait à la fin, mordu par une impatience puérile, et, comme elle venait prier sa mère de porter son premier bouquet pour qu’elle en pût cueillir un autre, il l’attrapa par le coude et lui serra le bras, afin qu’elle ne s’échappât plus. Elle se débattait en riant et tirait de toute sa force pour s’en aller ; alors, mû par un instinct d’homme, il employa le moyen des faibles, et ne pouvant séduire son attention, il l’acheta, en tentant sa coquetterie.

— Dis-moi, dit-il, quelle fleur tu préfères, je t’en ferai faire une broche.

Elle hésita, surprise.

— Une broche, comment ?

— En pierres de la même couleur : en rubis si c’est le coquelicot ; en saphir si c’est le bluet, avec une petite feuille en émeraudes.

La figure d’Annette s’éclaira de cette joie affectueuse dont les promesses et les cadeaux animent les traits des femmes.

— Le bleuet, dit-elle, c’est si gentil !

— Va pour un bleuet. Nous irons le commander dès que nous serons de retour à Paris.

Elle ne partait plus, attachée à lui par la pensée du bijou qu’elle essayait déjà d’apercevoir, d’imaginer. Elle demanda :

— Est-ce très long à faire, une chose comme ça ?