Page:Maupassant - Fort comme la mort.djvu/351

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Elle demanda, enfin :

— Vous souffrez beaucoup ?

Il ne répondit pas.

Elle se pencha vers lui et posa un doigt sur son front pour le forcer à la regarder. Il ouvrit, en effet, les yeux, des yeux éperdus, des yeux fous.

Elle répéta terrifiée :

— Vous souffrez ?… Olivier ! Répondez-moi ! Voulez-vous que j’appelle… faites un effort, dites-moi quelque chose !…

Elle crut entendre qu’il balbutiait :

— Amenez-la… vous me l’avez juré…

Puis il s’agita sous ses draps, le corps tordu, la figure convulsée et grimaçante.

Elle répétait :

— Olivier, mon Dieu ! Olivier, qu’avez-vous ? voulez-vous que j’appelle…

Il l’avait entendue, cette fois, car il répondit :

— Non… ce n’est rien.

Il parut en effet s’apaiser, souffrir moins, retomber tout à coup dans une sorte d’hébétement somnolent. Espérant qu’il allait dormir, elle se rassit auprès du lit, reprit sa main, et attendit. Il ne remuait plus, le menton sur la poitrine, la bouche entr’ouverte par sa respiration courte qui semblait lui racler la gorge en passant. Seuls, ses doigts s’agitaient par moments, malgré lui, avaient des secousses légères, que la comtesse percevait jusqu’à