Page:Maupassant - L’Inutile Beauté, OC, Conard, 1908.djvu/48

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et nourris, ils n’ont qu’à brouter ou à chasser et à s’entre-manger, selon leurs instincts, car Dieu n’a jamais prévu la douceur et les mœurs pacifiques ; il n’a prévu que la mort des êtres acharnés à se détruire et à se dévorer.

— Quant à nous ! Ah ! ah ! il nous en a fallu du travail, de l’effort, de la patience, de l’invention, de l’imagination, de l’industrie, du talent et du génie pour rendre à peu près logeable ce sol de racines et de pierres. Mais songe à ce que nous avons fait, malgré la nature, contre la nature pour nous installer d’une façon médiocre, à peine propre, à peine confortable, à peine élégante, pas digne de nous.

— Et plus nous sommes civilisés, intelligents, raffinés, plus nous devons vaincre et dompter l’instinct animal qui représente en nous la volonté de Dieu.

— Songe qu’il nous a fallu inventer la civilisation, toute la civilisation, qui comprend tant de choses, tant, tant, de toutes sortes, depuis les chaussettes jusqu’au téléphone. Songe à tout ce que tu vois tous les jours, à tout ce qui nous sert de toutes les façons.

— Pour adoucir notre sort de brutes, nous avons découvert et fabriqué de tout, à commencer