Page:Maupassant - L’Inutile Beauté, OC, Conard, 1908.djvu/98

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il l’installe dans une belle propriété près de Meulan, au milieu d’un parc, grand comme une forêt. Ça dure dix-huit mois environ… comme je vous ai dit. Puis nous sentons approcher la fin. Il venait tous les jours de Paris, et il avait du chagrin, mais là, du vrai.

Donc un matin, ils avaient jacassé ensemble près d’une heure, et je me demandais de quoi ils pouvaient jaboter si longtemps quand on m’appelle. Et maman me dit :

— Je suis près de mourir et il y a quelque chose que je veux te révéler, malgré l’avis du comte. — Elle l’appelait toujours "le comte" en parlant de lui. — C’est le nom de ton père, qui vit encore.

Je le lui avais demandé plus de cent fois… plus de cent fois… le nom de mon père… plus de cent fois… et elle avait toujours refusé de le dire…

Je crois même qu’un jour j’y ai flanqué des gifles pour la faire jaser, mais ça n’a servi de rien. Et puis, pour se débarrasser de moi, elle m’a annoncé que vous étiez mort sans le sou, que vous étiez un pas grand-chose, une erreur de sa jeunesse, une gaffé de vierge, quoi. Elle me l’a si bien raconté que j’y ai coupé, mais en plein, dans votre mort.

Donc elle me dit :