Page:Maupassant - La Maison Tellier.djvu/208

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La femme, grande, grosse, avec un ventre d’hydropique qui rejetait le torse en arrière, ouvrait des yeux effarés, prête à fuir. Le mari, un cordonnier socialiste, petit homme poilu jusqu’au nez, tout pareil à un singe, murmura sans s’émouvoir : — « Eh bien, quoi ? Elle ressuscite ! »

Aussitôt que Mme  Caravan les eut reconnus, elle leur fit des signes désespérés ; puis, tout haut : — « Tiens ! comment !… vous voilà ! Quelle bonne surprise ! »

Mais Mme  Braux, abasourdie, ne comprenait pas ; elle répondit à demi-voix : — « C’est votre dépêche qui nous a fait venir, nous croyions que c’était fini. »

Son mari, derrière elle, la pinçait pour la faire taire. Il ajouta avec un rire malin caché dans sa barbe épaisse : — « C’est bien aimable à vous de nous avoir invités. Nous sommes venus tout de suite », — faisant allusion ainsi à l’hostilité qui régnait depuis longtemps entre les deux ménages. Puis, comme la vieille arrivait aux dernières marches, il s’avança vivement et frotta contre