Page:Maupassant - La Vie errante.djvu/11

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dans le coudoiement, dans le frôlement, dans l’emmêlement de toute cette chair échauffée, dans cette sueur confondue de tous les peuples semant leurs puces sur les sièges et par les chemins, je trouvais bien légitime qu’on allât manger une fois ou deux, avec dégoût et curiosité, la cuisine de cantine des gargotiers aériens, mais je jugeais stupéfiant qu’on pût dîner, tous les soirs, dans cette crasse et dans cette cohue, comme le faisait la bonne société, la société délicate, la société d’élite, la société fine et maniérée qui, d’ordinaire, a des nausées devant le peuple qui peine et sent la fatigue humaine.

Cela prouve d’ailleurs, d’une façon définitive, le triomphe complet de la démocratie.

Il n’y a plus de castes, de races, d’épidermes aristocrates. Il n’y a plus chez nous que des gens riches et des gens pauvres. Aucun autre classement ne peut différencier les degrés de la société contemporaine.

Une aristocratie d’un autre ordre s’établit qui vient de triompher à l’unanimité à cette Exposition universelle, l’aristocratie de la science, ou plutôt de l’industrie scientifique.

Quant aux arts, ils disparaissent ; le sens même