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les épingles

— J’écris des lettres anonymes à son mari pour qu’il la surveille les jours où je l’attends.

— Ça c’est grave ! Moi je n’ai pas de résistance. Je ne sais pas rompre. Je les collectionne. Il y en a que je ne vois plus qu’une fois par an, d’autres tous les dix mois, d’autres au moment du terme, d’autres les jours où elles ont envie de dîner au cabaret. Celles que j’ai espacées ne me gênent pas, mais j’ai souvent bien du mal avec les nouvelles pour les distancer un peu.

— Alors…

— Alors, mon cher, la petite ministère était tout feu, tout flamme, sans un tort, comme je te l’ai dit ! Comme son mari passe tous ses jours au bureau, elle se mettait sur le pied d’arriver chez moi à l’improviste. Deux fois elle a failli rencontrer mon habitude.

— Diable !

— Oui. Donc j’ai donné à chacune ses jours, des jours fixes pour éviter les confusions. Lundi et samedi à l’ancienne. Mardi, jeudi et dimanche à la nouvelle.

— Pourquoi cette préférence ?

— Ah ! mon cher, elle est plus jeune.