Page:Maupassant - Le Horla, OC, Conard, 1909.djvu/140

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Le jour baissait ; l’air plus frais entrait par souffles plus vifs, faisait voltiger contre le mur une image d’Épinal tenue par deux épingles ; les petits rideaux de la fenêtre, jadis blancs, jaunes maintenant et couverts de taches de mouche, avaient l’air de s’envoler, de se débattre, de vouloir partir, comme l’âme de la vieille.

Elle, immobile, les yeux ouverts, semblait attendre avec indifférence la mort si proche qui tardait à venir. Son haleine, courte, sifflait un peu dans sa gorge serrée. Elle s’arrêterait tout à l’heure , et il y aurait sur la terre une femme de moins, que personne ne regretterait.

A la nuit tombante, Honoré rentra. S’étant approché du lit, il vit que sa mère vivait encore, et il demanda :

— Ça va-t-il ?

Comme il faisait autrefois quand elle était indisposée.

Puis il renvoya la Rapet en lui recommandant :

— D’main, cinq heures, sans faute.

Elle répondit :

— D’main, cinq heures.

Elle arriva, en effet, au jour levant. Honoré, avant de se rendre aux terres, mangeait sa soupe, qu’il avait faite lui-même.