Page:Maupassant - Le Horla, OC, Conard, 1909.djvu/56

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dans un massif de lauriers. Comme ce fut long ! comme ce fut long ! Tout était noir, muet, immobile ; pas un souffle d’air, pas une étoile, des montagnes de nuages qu’on ne voyait point, mais qui pesaient sur mon âme si lourds, si lourds.

Je regardais ma maison, et j’attendais. Comme ce fut long ! Je croyais déjà que le feu s’était éteint tout seul, ou qu’il l’avait éteint, Lui, quand une des fenêtres d’en bas creva sous la poussée de l’incendie, et une flamme, une grande flamme rouge et jaune, longue, molle, caressante, monta le long du mur blanc et le baisa jusqu’au toit. Une lueur courut dans les arbres, dans les branches, dans les feuilles, et un frisson, un frisson de peur aussi ! Les oiseaux se réveillaient ; un chien se mit à hurler ; il me sembla que le jour se levait ! Deux autres fenêtres éclatèrent aussitôt, et je vis que tout le bas de ma demeure n’était plus qu’un effrayant brasier. Mais un cri, un cri horrible, suraigu, déchirant, un cri de femme passa dans la nuit, et deux mansardes s’ouvrirent ! J’avais oublié mes domestiques ! Je vis leurs faces affolées, et leurs bras qui s’agitaient ! . . .

Alors, éperdu d’horreur, je me mis à courir vers le village en hurlant : « Au secours ! au secours ! au feu ! au feu ! » Je rencontrai des