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UNE FAMILLE

J’allais revoir mon ami Simon Radevin que je n’avais point aperçu depuis quinze ans.

Autrefois c’était mon meilleur ami, l’ami de ma pensée, celui avec qui on passe les longues soirées tranquilles et gaies, celui à qui on dit les choses intimes du cœur, pour qui on trouve, en causant doucement, les idées rares, fines, ingénieuses, délicates, nées de la sympathie même qui excite l’esprit et le met à l’aise.

Pendant bien des années nous ne nous étions guère quittés. Nous avions vécu, voyagé, songé, rêvé ensemble, aimé les mêmes choses d’un même amour, admiré les mêmes livres, compris les mêmes œuvres, frémi des mêmes sensations, et si souvent ri des mêmes êtres que nous nous comprenions complètement, rien qu’en échangeant un coup d’œil.

Puis il s’était marié. Il avait épousé tout à coup