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LE PÈRE MILON

disiez tout. Vous ferez donc bien de vous décider immédiatement. Comment avez-vous commencé ?

L’homme jeta un regard inquiet sur sa famille attentive derrière lui. Il hésita un instant encore, puis, tout à coup, se décida.

— Je r’venais un soir, qu’il était p’t-être dix heures, le lend’main que vous étiez ici. Vous, et pi vos soldats, vous m’aviez pris pour pu de chinquante écus de fourrage avec une vaque et deux moutons. Je me dis : Tant qu’i me prendront de fois vingt écus, tant que je leur y revaudrai ça. Et pi j’avais d’autres choses itou su l’cœur, que j’vous dirai. Vl’à qu’j’en aperçois un d’vos cavaliers qui fumait sa pipe su mon fossé, derrière ma grange. J’allai décrocher ma faux et je r’vins à p’tits pas par derrière, qu’il n’entendit seulement rien. Et j’li coupai la tête d’un coup, d’un seul, comme un épi, qu’il n’a pas seulement dit « ouf ! » Vous n’auriez qu’à chercher au fond d’la mare : vous le trouveriez dans un sac à charbon, avec une pierre de la barrière.

« J’avais mon idée. J’pris tous ses effets d’puis