Page:Maupassant - Le Père Milon, 1899.djvu/163

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UNE PASSION


La mer était brillante et calme, à peine remuée par la marée, et sur la jetée toute la ville du Havre regardait entrer les navires.

On les voyait au loin, nombreux, les uns, les grands vapeurs, empanachés de fumée ; les autres, les voiliers, traînés par des remorqueurs presque invisibles, dressant sur le ciel leurs mâts nus, comme des arbres dépouillés.

Ils accouraient de tous les bouts de l’horizon vers la bouche étroite de la jetée qui mangeait ces monstres ; et ils gémissaient, ils criaient, ils sifflaient, en expectorant des jets de vapeur comme une haleine essoufflée.

Deux jeunes officiers se promenaient sur le môle couvert de monde, saluant, salués, s’arrêtant parfois pour causer.