Page:Maupassant - Le Rosier de Madame Husson.djvu/215

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de Fontenne prit part aux grandes manœuvres du 32e corps d’armée.

Un soir, comme on campait aux abords d’une ville, après dix jours de tente et de rase campagne, dix jours de fatigues et de privations, les camarades du capitaine résolurent de faire un bon dîner.

M. de Fontenne refusa d’abord de les accompagner ; puis, comme son refus les surprenait, il consentit.

Son voisin de table, le commandant de Favré, tout en causant des opérations militaires, seule chose qui passionnât le capitaine, lui versait à boire coup sur coup. Il avait fait très chaud dans le jour, une chaleur lourde, desséchante, altérante ; et le capitaine buvait sans y songer, sans s’apercevoir que, peu à peu, une gaieté nouvelle entrait en lui, une certaine joie vive, brûlante, un bonheur d’être, plein de désirs éveillés, d’appétits inconnus, d’attentes indécises.

Au dessert il était gris. Il parlait, riait, s’agitait, saisi par une ivresse bruyante, une ivresse