Page:Maupassant - Le Rosier de Madame Husson.djvu/302

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ma demande. J’étais amoureux d’elle et j’allais le devenir trop. Quand on se marie, il ne faut pas trop aimer sa femme, parce qu’alors on fait des bêtises ; on se trouble, on devient en même temps niais et brutal. Il faut se dominer encore. Si on perd la tête le premier soir, on risque fort de l’avoir boisée un an plus tard.

Donc, un jour, je me présentai chez elle avec des gants clairs et je lui dis : « Madame, j’ai le bonheur de vous aimer et je viens vous demander si je puis avoir quelque espoir de vous plaire, en y mettant tous mes soins, et de vous donner mon nom. »

Elle me répondit tranquillement : « Comme vous y allez, monsieur ! J’ignore absolument si vous me plairez tôt ou tard ; mais je ne demande pas mieux que d’en faire l’épreuve. Comme homme, je ne vous trouve pas mal. Reste à savoir ce que vous êtes comme cœur, comme caractère et comme habitudes. La plupart des mariages deviennent orageux ou criminels, parce qu’on ne se connaît pas assez en s’accouplant.