Page:Maupassant - Les Sœurs Rondoli.djvu/130

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« Pardon, mon révérend père, je ne vous accompagnerai pas, mes convictions ne me le permettent point. J’ai même refusé de venir vous chercher ; aussi je vous prierai de ne pas avouer que vous m’avez vu, mais de vous dire prévenu de la maladie de mon oncle par une espèce de révélation. »

Le bonhomme y consentit et s’en alla, d’un pas rapide, sonner à la porte de mon oncle Sosthène. La servante qui soignait le malade ouvrit bientôt ; et je vis la soutane noire disparaître dans cette forteresse de la libre pensée.

Je me cachai sous une porte voisine pour attendre l’événement. Bien portant, mon oncle eût assommé le jésuite, mais je le savais incapable de remuer un bras, et je me demandais avec une joie délirante quelle invraisemblable scène allait se jouer entre ces deux antagonistes ? Quelle lutte ? quelle explication ? quelle stupéfaction ? quel brouillamini ? et quel dénoûment à cette situation sans issue, que l’indignation de mon oncle rendrait plus tragique encore ?

Je riais tout seul à me tenir les côtes ; je me répétais à mi-voix : « Ah ! la bonne farce, la bonne farce ! »

Cependant il faisait froid, et je m’aperçus que le