Page:Maupassant - Les Sœurs Rondoli.djvu/18

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crier en toute occasion avec des gestes exubérants.

Le train partit.

Elle demeurait immobile à sa place, les yeux fixés devant elle dans une pose renfrognée de femme furieuse. Elle n’avait pas même jeté un regard sur nous.

Paul se mit à causer avec moi, disant des choses apprêtées pour produire de l’effet, étalant une devanture de conversation pour attirer l’intérêt comme les marchands étalent en montre leurs objets de choix pour éveiller le désir.

Mais elle semblait ne pas entendre.

— « Toulon ! dix minutes d’arrêt ! Buffet ! » cria l’employé.

Paul me fit signe de descendre, et, sitôt sur le quai : « Dis-moi qui ça peut bien être ? »

Je me mis à rire : « Je ne sais pas, moi. Ça m’est bien égal. »

Il était fort allumé : « Elle est rudement jolie et fraîche, la gaillarde. Quels yeux ! Mais elle n’a pas l’air content. Elle doit avoir des embêtements ; elle ne fait attention à rien. »

Je murmurai : « Tu perds tes frais. »