Page:Maupassant - Les Sœurs Rondoli.djvu/90

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— C’te ferme, vous n’voulez toujours point m’la vendre ?

— Pour ça, non. N’y comptez point. C’est dit, c’est dit, n’y r’venez pas.

— C’est qu’j’ai trouvé un arrangement qui f’rait notre affaire à tous les deux.

— Qué qu’c’est ?

— Le v’la. Vous m’la vendez, et pi vous la gardez tout d’même. Vous n’y êtes point ? Suivez ma raison.

La vieille cessa d’éplucher ses légumes et fixa sur l’aubergiste ses yeux vifs sous leurs paupières fripées.

Il reprit :

— Je m’explique. J’vous donne, chaque mois cent cinquante francs. Vous entendez bien : chaque mois j’vous apporte ici, avec mon tilbury, trente écus de cent sous. Et pi n’y a rien de changé de plus, rien de rien ; vous restez chez vous, vous n’vous occupez point de mé, vous n’me d’vez rien. Vous n’faites que prendre mon argent. Ça vous va-t-il ?

Il la regardait d’un air joyeux, d’un air de bonne humeur.

La vieille le considérait avec méfiance, cherchant le piège. Elle demanda :