Page:Maupassant - Les inconnues, paru dans Gil Blas, 16 octobre 1883.djvu/6

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attendant ses lettres, le soir, dans son lit, et regarde avec mépris les êtres inférieurs dont elle mange le pain.

4e groupe. — La vieille demoiselle solitaire. Toute sa vie fut triste, et elle rêva toute sa vie. Personne jamais ne l’a comprise, ne l’a connue. Elle a toujours souffert de cet abandon général, de cet isolement absolu. Une seule phrase peut-être, lue un soir à la clarté de la lampe, l’a secouée jusqu’au fond de son pauvre cœur. Elle prend une feuille de papier et elle se met à écrire. Elle verse sur ce papier, d’une façon discrète cependant, toutes les intimes misères de son existence lamentable. Elle se rappelle peu à peu tant de chagrins qu’elle n’a jamais dits, tant de souffrances de l’âme, tant de jours sinistres écoulés les uns derrière les autres ! Elle conte tout cela, dans cette nuit d’é-