Page:Maupassant - Les inconnues, paru dans Gil Blas, 16 octobre 1883.djvu/9

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tout. Donc j’ose, sans aller par quatre chemins. Je ne suis pas vieille, je ne suis pas laide ; on peut m’aimer. Je m’ennuie. Les hommes qui m’entourent m’assomment. Voulez-vous que je vous enlève vendredi prochain ? Nous dînerons au cabaret, et je vous laisserai me baiser les mains. »

L’écrivain se frise les moustaches. C’est crâne, cela. Donc à vendredi.

Il arrive le premier, commande le dîner, et attend. Soudain la porte s’ouvre, une femme entre, voilée. La taille est un peu épaisse, mais la main blanche et fine ; car elle se dégante aussitôt. Puis elle pose ses deux bras sur les épaules de l’élu, le regarde au fond des yeux, et dit, d’une voix caressante, un peu voilée, comme timide : « Bonjour, mon ami. »

Il n’a plus qu’une chose à faire. Il prend dans ses bras sa conquête, et ému déjà, vibrant d’ardeur, il baise les voiles avec