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une ruse

eussent été gelées, je leur dis : « Aidez-moi à le porter sur le lit. » Et on le coucha doucement. Alors, j’auscultai le cœur et je posai une glace devant la bouche ; puis je murmurai : « C’est fini, habillons-le « bien vite. » Ce fut une chose affreuse à voir !

« Je prenais un à un les membres comme ceux d’une énorme poupée, et je les tendais aux vêtements qu’apportaient les femmes. On passa les chaussettes, le caleçon, la culotte, le gilet, puis l’habit où nous eûmes beaucoup de mal à faire entrer les bras.

« Quand il fallut boutonner les bottines, les deux femmes se mirent à genoux, tandis que je les éclairais ; mais comme les pieds étaient enflés un peu, ce fut effroyablement difficile. N’ayant pas trouvé le tire-boutons, elles avaient pris leurs épingles à cheveux.

« Sitôt que l’horrible toilette tut terminée, je considérai notre œuvre et je dis : « Il faudrait le repeigner un peu. » La bonne alla chercher le démêloir et la brosse de sa maîtresse ; mais comme elle tremblait et arrachait, en des mouvements involontaires, les cheveux longs et mêlés, Mme Lelièvre s’empara violemment du peigne, et elle rajusta la chevelure avec douceur, comme si elle l’eût caressée. Elle refit