Page:Maupassant - Mont-Oriol, éd. Conard, 1910.djvu/176

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leux, qui se jugent purifiés par le dévouement et la sincérité.

Et, derrière le mur qui les séparait, elle lui jeta des baisers. C’était fini, elle s’abandonnait à lui, sans réserve, comme on s’offre à un Dieu. L’enfant déjà coquette et rusée, mais encore timide, encore tremblante, venait de mourir brusquement en elle ; et la femme était née, prête pour la passion, la femme résolue, tenace, seulement annoncée jusqu’ici par l’énergie cachée en son œil bleu, qui donnait un air de courage et presque de bravade à sa mignonne figure blonde.

Elle entendit ouvrir la porte, et ne se retourna pas, devinant son mari sans le voir, comme si un sens nouveau, presque un instinct, venait aussi d’éclore en elle.

Il demanda :

— Seras-tu bientôt prête ? Nous irons tout à l’heure au bain du paralytique, pour voir s’il va vraiment mieux.

Elle répondit avec calme :

— Oui, mon cher Will, dans cinq minutes.

Mais Gontran, rentrant dans le salon, rappelait Andermatt.

— Figurez-vous, disait-il, que j’ai rencontré dans le parc cet imbécile d’Honorat qui refuse aussi de vous soigner, par crainte des